Le 10 octobre marque la Journée nationale des DYS. Les troubles DYS, ça inclut la dysphasie (trouble du langage oral), la dyslexie (trouble du langage écrit), la dyspraxie (trouble de la motricité fine et globale) ainsi que la dysorthographie et la dyscalculie. Pour souligner l’occasion, nous vous proposons une rencontre avec Marilyn Briand, gestionnaire d’acquisition de talents chez Ubisoft Montréal, qui est dyslexique.
Marilyn, quelles sont les particularités de ta dyslexie?
Pour ma part, j’ai de grandes difficultés à rédiger de longs textes et une quasi-incapacité à apprendre par cœur, c’est-à-dire l’apprentissage procédural. J’ai aussi beaucoup de difficulté avec le langage subtil, c’est pourquoi je privilégie les conversations franches qui vont droit au but. Ce ne sont que quelques exemples de désavantages très personnels; tou·tes les dyslexiques sont différent·es.
Concrètement, comment est-ce que ta dyslexie se présente?
Souvent, je n’utilise pas les bons mots ou les bonnes expressions. Par exemple, j’ai déjà dit « étalon de paie » plutôt que « talon de paie », « information de technologie » plutôt que « technologie de l’information », « humour » plutôt qu’« humeur ». Des erreurs de ce genre, j’en ai fait autant dans ma vie professionnelle que ma vie personnelle. S’en rendre compte — plutôt que « s’en rendre contre »! — est un travail quotidien pour moi.
Comment se sont déroulés tes parcours scolaire et professionnel?
Souvent, ma dyslexie a été un obstacle. J’ai échoué à des tests psychométriques et des tests de rédaction à la main qui ne prenaient pas en compte mon trouble. À l’école, il m’a fallu longtemps avant que je reçoive tout le soutien dont j’avais besoin; mes résultats en ont évidemment et malheureusement souffert. Par la suite, côté professionnel, je n’osais pas postuler à des emplois pour lesquels je jugeais que ma dyslexie était un obstacle. Ça m’a certainement freiné dans mon parcours professionnel.
Aujourd’hui, pourquoi t’est-il important de parler de dyslexie?
J’ai l’impression que les mentalités commencent à évoluer sur le sujet. On parle davantage de neurodiversité et je trouve important de contribuer en parlant ouvertement de ma dyslexie. Je crois foncièrement qu’utiliser cette condition particulière comme une force est possible. Par exemple, des études démontrent que les dyslexiques utilisent davantage l’hémisphère droit de leur cerveau que les non-dyslexiques, ce qui contribue à développer des capacités analytiques supérieures. Plusieurs dyslexiques ont une facilité pour l’intelligence spatiale… ce qui n’est pas particulièrement mon cas! Certain·es sont capables de faire des liens rapidement entre des idées ou des théories différentes, et ce, malgré notre mémoire procédurale plus faible. Aussi, quand on prend le temps de bien nous expliquer la théorie et tous les aspects d’une problématique, notre raisonnement et nos pistes de solution sont souvent plus étoffés et complets. Enfin, plusieurs disent que nos (nombreuses) erreurs font notre charme et j’aime bien les croire!
Que souhaites-tu pour l’avenir des DYS?
En 2021, le paradigme change: on célèbre davantage les différences et les forces des un·es et des autres pour avoir un monde plus inclusif. Auparavant, je n’aurais jamais osé écrire aussi ouvertement sur ma dyslexie. Je souhaite que d’autres, comme moi, ne ressentent pas le besoin de cacher leur trouble DYS, n’aient pas peur d’en parler, afin qu’on puisse faire avancer les attitudes.
As-tu des suggestions de lecture sur le sujet?
Oui! Je conseille le livre qui m’a aidé à mettre en lumière certaines qualités que j’avais et qui se nomme The Dyslexic Advantage de Brock L. Eide et Fernette F. Eide. Aussi, je vous invite à vous inspirer du parcours de célébrités qui ont su, comme moi, tirer parti de leur dyslexie: Steven Spielberg, Richard Branson et F. Scott Fitzgerald.